Kacimi, rencontre avec un artiste plein de « Panache »

mardi 15 octobre 2024, par Franco Onweb

Alexis Kacimi vient de sortir un nouvel album, « Panache », sous haute influence pop ! Je pourrais m’arrêter là mais ce serait dommage, et surtout totalement réducteur car il est un de ces artistes trop rare qui fait que la musique d’ici recèle des pépites. Entre le rock et la pop, il n’a jamais su choisir et c’est tant mieux. Lui, qui a commencé sa carrière avec les impeccables « Rebel of Tijuana », un trio qui avait su parfaitement assimiler ses influences sixties et psychédéliques, s’est lancé dans une carrière solo où il sait parfaitement incorporer le rock et la pop.

Alors que sort son quatrième album solo, j’ai discuté avec Alexis. Une conversation passionnante où il sera question de sa passion de la musique, de son label « le Pop Club », un label aussi excitant qu’indispensable par ses sorties, et de pop culture. Bienvenu dans l’univers d’un artiste plein de « Panache » que vous allez adorer découvrir !

Je suis Alexis Kacimi, ça fait plus de 20 ans que je joue dans des groupes entre Lyon et Genève. Dans les années 2010, j’ai monté The Rebels of Tijuana avec lequel j’ai beaucoup joué. Depuis quelques années, je me produis essentiellement en solo ou avec d’autres artistes genevois (Le Roi Angus, La Cabane de Baldwin, Romano Bianchi…). Je viens tout juste de sortir mon quatrième album « Panache ».

Alexis Kacimi
Crédit : Medhi Benkler

C’est quoi ton parcours musical ?

A la base j’ai appris le saxophone au conservatoire, donc pas mal de musique classique et de jazz. A l’adolescence j’ai commencé à jouer de la guitare et de la basse, chanter dans des groupes. Je suis à présent enseignant de musique. Je fais des ateliers et ça me plait bien de transmettre. Aujourd’hui je ne fais que ça entre les répétitions, la composition, l’enseignement ou les enregistrements

Quand j’ai écouté ta musique, j’ai trouvé que c’était de la Pop, au sens global du terme.

Oui, c’est ça ! J’aime beaucoup de choses : la Country, le Jazz, la pop, des gens comme Neil Young, Paul Weller ou encore Wilco… J’ai beaucoup de disques et je ne me suis pas arrêté à un style comme le Garage ou l’Electronica. Là, je sors un disque qui est très posé, très pop. Il y a quelques semaines on a enregistré un autre disque avec le groupe qui m’accompagne. On a fait un truc totalement différent avec beaucoup de guitares fuzz, l’opposé de « Panache ». C’est pour ça que j’aime Paul Weller ou Neil Young : on ne s’attend jamais à ce qu’ils vont faire. Quand je fais un truc trop garage, ça me fatigue et quand c’est trop calme, je veux faire un truc plus rock. Je ne suis jamais satisfait (rires).

Je ne sais pas pourquoi mais je pense que tu es un grand fan de Soul Music.

Mon père en écoutait beaucoup. J’ai écouté du rock à l’adolescence mais avec des gens comme Paul Weller, justement, c’est revenu et c’est toujours en moi. J’essaye de faire groover mes morceaux…

Mais tu as une attitude assez Mods en fait ?

La démarche de Paul Weller m’a toujours assez impressionné pour ça. La musique Mods ce n’est pas que les Who ou les Small Faces. Même si parfois Weller va assez loin quand il part dans la House par exemple, il essaie des choses. Les Mods sont assez fascinants. J’ai fait pas mal de festivals sixties avec The Rebels of Tijuana, mais je dois dire que parfois c’est tellement revival que ça en devient chiant, loin de l’esprit moderniste. Il y a beaucoup de nostalgie chez les mods actuels.

Comment es-tu passé du groupe au solo ?

Très facilement. La démarche est presque la même sans les inconvénients. Je me suis retrouvé avec des copains dans un studio. J’ai drivé le truc. J’ai fait mes autres disques de la même manière. Pour défendre ces disques, j’ai la chance d’avoir une excellente équipe live baptisée « La Mécréance ». On fait du studio ensemble, et parfois je fais des trucs seuls. Tout reste ouvert mais toujours un grand plaisir de faire des concerts ou du studio avec eux.

Mais est ce que le fait d’être tout seul, ne t’as pas permis de sortir des influences que tu ne pouvais pas sortir avec le groupe ?

Bien sûr ! Parfois tu ne fais pas des choses parce que tu es limité par le groupe. J’enregistre beaucoup et j’adore ça : tout est possible !

En groupe
Crédit : Thibault Duquesne

Tu as un côté très « Do It Yourself » ?

J’ai le label « Le Pop Club » qui me permet de sortir des disques mais ce sont souvent les mêmes équipes qui enregistrent. On fait un projet pour l’un et puis on attaque un projet pour un autre. On s’est créé une petite « Factory ». Aujourd’hui, il faut savoir faire beaucoup de choses seuls dans la conception d’un disque

On va parler de ton label « Le Pop Club ». Il est né comment ?

C’est un label associatif qui est né autour de trois groupes dont The Rebels of Tijuana. On voulait produire nos disques. On a attaqué en 2011, et c’est devenu plus actif en 2016 quand on a vraiment commencé à travailler sur les disques d’autres artistes. On a 80 références, avec parfois des co-productions avec d’autres structures. Mais si tu prends un artiste comme Nick Weldon, c’est vraiment quelqu’un avec qui on a tout fait de A à Z. On a sorti tous ses albums solos, on a organisé des concerts… Bon en même temps Nick est le mec le plus cool de la terre.

Je voudrais que l’on parle des Bandes Originales, les BO, que vous rééditez. Vous avez des grands films comme « les Tontons Flingueurs » ou « Un singe en hiver ».

A la base, je voulais à tout prix sortir « Coup de tête ». Sorte d’obsession. J’ai vu que la BO n’était jamais sortie en vinyle. Je me suis adressé à l’éditeur et on a pu bosser ça assez facilement. Depuis on a travaillé une série, avec un visuel qui revient sur toutes les pochettes. Je suis très content de cette série qui nous a apporté un public différent.

On va parler de ton nouvel album, le quatrième, qui s’appelle « Panache ». Tu l’as fait où et avec qui ?

A Genève avec deux musiciens suisses avec qui j’ai beaucoup joué Léonard Persoz et Augustin von Arx. On est parti d’un principe simple : guitare, piano, voix. On a d’abord enregistré cette base et ensuite on a rajouté des choses dessus. Donc une création faite en studio. Comme ils sont très créatifs et très cools, les choses se sont faites naturellement. Une de mes plus belle expérience studio tant humainement qu’artistiquement.

Vous l’avez fait à trois ?

Oui à trois dans une seule pièce, dans une maison en campagne genevoise. On n’a pas bougé de cet endroit. Augustin est ingénieur du son, batteur, Léo, guitariste, bidouilleur de l’espace. Ils ont réalisé un énorme boulot. La session s’est déroulée sur un an. Comme c’était de la création en direct on a vraiment pris le temps. Parfois on pouvait passer une journée sur un son. Ils n’ont pas vraiment compté leur temps.

Tu n’avais que les bases du morceau ?

Oui, on a trouvé les arrangements en enregistrant.

En concert
Droits réservés

A l’écoute du disque, il y a beaucoup de Farfisa et d’électronica. D’ailleurs tu dis dans une bio que tu cites Air comme influences et ensuite il y a des mélodies Pop quasi parfaites.

Merci, pour Air j’ai toujours aimé ce groupe, comme Bertrand Burgalat que j’adore. Je n’ai pas trop la culture du clavier. Mon truc c’est le Vox, la guitare, les Kinks, Les Byrds pour résumer, mais pas trop le clavier type 80’s. Augustin et Léo sont très décomplexés par rapport à ça. Ils m’ont emmené sur ce terrain où je n’aurais pas été forcément, avec ces textures de son. Je n’ai pas trop réfléchi, je leur ai fait énormément confiance. Et j’ai appris à aimer certaines ambiances qu’ils m’ont proposé.

Tu as aussi de superbes arrangements !

Merci beaucoup. Pour les concerts, on a dû supprimer ou simplifier des arrangements. On va jouer dans des clubs et donc ne veut pas « surcharger » l’affaire. Sur scène ce sera plus « rock ». On va ouvrir les concerts avec six morceaux de cet album, je commencerai aux claviers et après plus de guitares.

Ils parlent de quoi tes textes ?

Si tu prends « les Soldats de l’oubli », c’est une évocation de la guerre. Nos textes sont un peu des tranches de vie. J’aurais du mal à chanter des gros mots ou des revendications. Des gens le font très bien mais pas moi. Les textes peuvent aussi être drôles. On peut comprendre plusieurs choses. Avec Romano on passe beaucoup de temps ensemble et comme on est assez moqueurs, il y a des allusions à des choses qui nous font rire. On essaye de se rapprocher humblement de la poésie.

Quels sont tes projets ?

Des concerts pour défendre le disque… On en a déjà quelques-uns et d’autres arrivent ! Et déjà sur d’autres enregistrements.

Tu as beaucoup joué en Allemagne ?

Oui, c’était un peu par hasard mais on a adoré. Il y a une vraie culture des concerts là-bas. On a trouvé un label à Dresde avec des gens supers !

Le mot de la fin ?
Je suis content de faire découvrir mon disque et je pousse vraiment les gens à aller s’intéresser au Pop Club, il y a des artistes fabuleux. On essaye d’avoir un esprit à la Stax avec des musiciens en commun.

Crédit : Medhi Benkler

Quel disque tu donnerais à des enfants pour les emmener vers la musique ?

C’est un sujet qui m’intéresse parce que je fais de l’enseignement depuis 10 ans. Au début, j’imposais des titres à mes élèves jusqu’à ce que je leur propose de venir avec leurs titres. Ce qui, parfois, a été une souffrance (rires). Quand des élèves (souvent des garçons !) me disent : « j’écoute uniquement du hip-hop US », c’est génial. Bonne porte d’ouverture pour remonter le temps et comprendre cette musique. L’histoire des samples. Et du coup James Brown ! par exemple… Le live « Sex Machine » (1970) est incroyable, une machine de groove. Il date pourtant, mais le lien avec le hip hop est là ! Tu ne peux, cependant, pas forcer à aimer mais au moins comprendre les aspects historiques dans la construction de certaines musiques.

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