Twisted Soul Records : le label qui monte !

lundi 5 décembre 2022, par Franco Onweb

C’est le label qui monte : Twisted Soul Records ! Un label qui, depuis deux ans, a sorti des rééditions et des productions passionnantes : Wild Child, Bad Losers, Thierry Gotti ou le maxi single de Christophe Van Huffel et Feelgood. L’année 2023, qui s’annonce, promet d’être une année faste pour Twisted Soul, puisque le label annonce la sortie du superbe John Wayne Supermarket et le premier album solo de Christophe Van Huffel.

Thierry Baron, à l’origine de ce label, est un esthète, un amoureux du son qui peaufine particulièrement l’image de ses productions. Un vrai amoureux de la musique et de la culture qui m’a raconté son parcours, son label et ses ambitions. 2023 s’annonce plutôt bien avec de tels activistes de la musique.

Comment la musique est rentrée dans ta vie ?

Mon histoire avec la musique commence en 1978, à 15 ans, quand je découvre le punk. Pas vraiment les anglais, plutôt les new yorkais comme Television, Richard Hell, Jim Carroll, les Ramones avant de découvrir les punks anglais avec notamment le Clash qui a été très important pour moi, notamment dans leur démarche politique et esthétique.

Thierry Baron
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Où étais tu ?

A l’époque j’habitais Marseille. J’ai rencontré un groupe, les Twisted Soul Lovers, totalement originaux et exaltés dans leur attitude. Leur musique c’était un mix entre Billie Holiday, Jimi Hendrix, Gun Club et des trucs tribaux. Ils voulaient faire de la musique tribale avant tout, déclencher des émotions avant de penser à faire des albums. On est montés à Paris tous ensemble. Les gens du sud, comme nous, n’avaient pas bonne presse à Paris. Je ne sais pas pourquoi (rires). On se retrouvait tous au Cithéa. Les sudistes comme les Bad Losers, les twisted et les Wild Child, mais aussi des gens de Roanne comme Thierry Gotti, tous ceux qui ont plus tard créé Megasonic boom blast et pleins d’autres… On n’avait pas un rond et on habitait tous les uns chez les autres. Les Twisted Souls Lovers se sont malheureusement séparés et j’ai rencontré Feelgood (chanteur des Bad Losers, NdlR) avec qui j’ai un temps habité à Saint-Ouen. Les Bad Losers venaient de se séparer de leur manager, çà a été une nouvelle opportunité.

C’était compliqué un groupe pareil ?

Je suis resté deux ans avec eux, jusqu’à la fin du groupe. Le groupe a explosé pour deux raisons parce qu’il y avait des musiciens qui se succédaient sans cesse et puis « too much too soon » … ce n’était pas qu’une légende Urbaine. Ensuite Feelgood est parti à Londres pour faire une maquette de House Music chez Dave Goodman qui avait produit l’album du groupe. Ça a été la fin du groupe. C’était le premier groupe de House Français. Il y avait des gens intéressés mais bon, ça ne s’est pas fait… Feelgood était toujours sur le plan d’après.

Et ensuite ?

J’ai recroisé Jim de Wild Child qui était en train de remonter un groupe avec le bassiste des Satan Jokers, un groupe de Hard rock et Fred un des guitaristes des Bad Losers. Leur projet s’appelait Jimmy Jazz. Je trouvais ça super bien et au moment où ça allait démarrer, le groupe splitte ! A ce moment-là moi aussi, j’ai splitté dans ma tête et j’ai décidé de tout arrêter en musique. Je suis parti un an à Toulouse où j’ai rencontré Joël le chanteur des Boys Scouts qui a plus tard fondé les Indian Ghost. J’ai complètement changé de vie après. Je suis parti à Prague et j’ai passé 10 ans entre la Tchécoslovaquie la France et ai entamé une longue parenthèse avec la scène musicale française…

Comment tu te relances dans la musique ?

En 2015, je retombe par hasard sur Jim de Wild Child sur internet. Il discutait avec Leeroy, le guitariste du groupe, de l’album qui n’était jamais sorti. Je lui ai demandé pourquoi et il m’a répondu qu’il n’avait pas les moyens de le sortir. J’avais un peu d’argent et je lui ai donc proposé de le sortir et de le produire. On n’avait pas de label et par relation j’ai rencontré Gilbert Castro de Celluloïd. A l’époque, il travaillait avec Silvère Vincent qui a été la personne clef pour sortir le disque sur Celluloïd.

C’était quoi ton rôle ?

J’étais le sponsor et je l’ai fait par amitié pour Jim et Leeroy. Ç’est sorti. On a fait une Release Party et voilà. J’étais content : je bouclais une histoire ! Quelques temps après je revois Feelgood et il me propose de ressortir l’album et des inédits des Bad Losers. D’autres amis m’ont alors suggéré de monter un label…et j’ai eu envie de me lancer dans cette aventure un peu folle.

La première sortie, c’était donc les Bad Losers ?

Oui et puis, rapidement, j’apprends par Silvère que Celluloid a tout arrêté. Comme je m’entendais bien avec Gilbert Castro, je l’ai appelé. Je lui ai dit que je montais un label et je voulais savoir si je pouvais continuer à proposer les CD de Wild Child. Ce grand monsieur, que je salue, a rendu cela possible ! Silvère avait sorti le disque en digital avec Nineteen Something et moi il me restait la partie physique. Cela m’allait très bien : j’avais une deuxième référence pour le label et j’étais fier de ces groupes et de ces disques qui représentent quelque part mon ancrage avec le rock Français.

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La sortie des Bad Losers était particulièrement réussie : des inédits, un disque pour le Disquaire Day. Il était très bien distribué.

Dom Disques, le distributeur a très bien fait son travail ! On a eu, en plus, beaucoup de presse. Suite à ça, Nadia, l’attachée de presse, m’a dit : « on est en plein Covid, cela va être compliqué de créer un événement pour la sortie du disque ». Elle a eu alors l’idée de nous demander de solliciter des amis proches de l’époque afin de reprendre un morceau des Bad Losers. On a eu Hervé Zerrouk un très proche des Bad Losers qui avaient fait leur premier concert en première partie quand il était dans les Désaxés. On a eu ensuite Daniel Jeanrenaud des Kingsnakes, Marc Minelli, Georges (Delanay blue) et bien d’autres… Pour finir Christophe Van Huffel (ex guitariste de Tanger et producteur de Christophe Ndlr) a mis une espèce de point d’orgue à cette série de reprises amicales. Tout cela figure sur Youtube.

Et ensuite ?

Quand j’ai écouté la version de Christophe, je l’ai trouvé décapante : il faisait une relecture du morceau. On aurait dit les Stranglers ! Je pensais en rester là mais Feelgood a voulu aussi faire une relecture du morceau. Il voulait en fait faire la suite de la chanson avec un côté Syd Barret- psyché, en rajoutant un côté français de la fin des années 60. J’ai écouté et c’était superbe ! J’avais décidé de faire une soirée pour lancer le label à la Dame de Canton et à cette occasion, sortir un 45t promo avec ces deux morceaux. On a eu un problème de pressage, je ne l’ai pas eu dans les temps et donc c’est devenu le maxi de Christophe Van Huffel et Feelgood ensemble qui est sorti avec presque un an de décalage…

Autre album que tu as sorti : Thierry Gotti et son album électro !

J’aime beaucoup Thierry et c’est un excellent musicien. Je me suis fixé comme règle avec le label de ne pas avoir une ligne artistique mais plutôt de faire des choses de qualité avec des gens avec qui j’ai des relations humaines. J’ai démarré ce label avec des potes. Thierry c’est un plaisir personnel et je ne voulais pas avoir l’image d’un label de rock et de ressorties. Le label va faire son histoire, il va suivre son cours, mais toujours avec des gens qui ont de vraies qualités, d’où l’album de Thierry !

Pour moi c’est un label d’esthètes pour esthètes !

Il y a un truc d’esthètes c’est sûr ! On verra ce que cela deviendra.

Tu as quand même sorti le premier morceau solo de Christophe Van Huffel ?

Et oui ! Il était le guitariste de Tanger mais surtout il a produit les 20 dernières années de Christophe avec un succès incroyable ! C’était la première fois qu’il chantait. Suite à ce maxi, il a eu envie de travailler sur un projet solo, un disque très personnel. Ce devrait être très beau, compte tenu de la qualité et de la sensibilité de l’homme !

Je lui ai présenté mon ami Philippe Gilard qui a joué dans les Indian Ghost. Cela fait des années que Philippe fait de la production, notamment pour Closer. Il fait aussi de la musique, que j’aime beaucoup. A la base de l’Americana mais en français, ce qui est nouveau. Quand Philippe et Christophe se sont apprivoisés, ça a été une évidence entre eux. Ils ont bossé ensemble sur le disque de Philippe. Le mix est pratiquement terminé et il va y avoir une sortie au printemps 2023. Avant il y aura une ou des vidéos ainsi qu’un ou des singles digitaux. Ce sont deux fous de sons qui se retrouvent ensemble !

La suite c’est quoi ?

John Wayne Supermarket, le groupe de Philippe, et Christophe Van Huffel pour son premier projet solo. Je veux faire des choses à ma mesure, ne pas cumuler les sorties et tenter de donner un maximum de visibilité sur ce qui va sortir désormais à compter de 2023.

John Wayne Supermarket - Photo
Crédit : Michel Planque
Christophe Van Huffel
Crédit : Max Well

Mais un label comme le tient n’est pas viable tout de suite ?

Non, je n’en vis pas et je ne m’équilibre pas encore. Je suis en train de monter en régime tout doucement.

L’esthétisme de ton label est très beau !

Merci, je fais attention à ça. Dans cette aventure j’ai embarqué un ami talentueux, un graphiste Sam Pagel, il y est pour beaucoup ! Et j’essaie aussi que les sorties physiques soient un peu sophistiquées dans leur packaging…Quand on acquiert un CD ou un vinyle, je pense, encore plus aujourd’hui qu’hier que l’on veut avoir un bel objet qui dépasse l’idée d’un pur « fichier son ».

Est-ce que l’avenir d’un label n’est pas de diversifier les activités comme l’édition ?

Bien sûr, c’est pour ça que je suis éditeur. J’ai toutes les éditions de ce que je sors et je sais qu’il faudra aller chercher, rapidement, des débouchés de ce côté-là.

Sur le sujet je suis d’ailleurs assez perplexe quand j’écoute les BO des séries tv US qui sont nourries de groupes indépendants alors que la production Française a l’air plutôt phagocytée… C’est une vraie question que je n’ai pas encore résolue…

Quels ont été les retours sur le label ?

Au niveau médiatique on a eu des bons retours mais les ventes restent faibles parce que ce sont des artistes relativement obscurs mais on se développe chaque jour un peu plus. J’ai de beaux projets et je suis ravi.

Tu fais des choses belles et très accessibles : c’est de la pop culture !

Bien sûr, par exemple pour John Wayne Supermarket, on va travailler avec des peintres surréalistes contemporains Franco/Tchèque parce que Philippe aime beaucoup le surréalisme Dada et aussi l’art brut et l’art naïf. On essaye de faire un pont avec tout ça et on est sur une réflexion qui dépasse le simple cadre musical, dans la droite file de ce que j’ai pu vivre en république tchèque avec cette ébullition culturelle multi media après la révolution de Velours.

Quant à Christophe (Van Huffel, Ndlr), en plus d’être un musicien hors pair c’est un véritable esthète dont je découvre la richesse du parcours musical, donc je suis totalement enthousiaste sur son projet également.

Pour moi tu as complètement dépassé le cadre de la musique avec l’esthétisme de ton label !

Merci, c’est flatteur. En tout cas on essaye ! Aujourd’hui je me considère comme un passeur, je ne suis pas un artiste et mon but est d’offrir un peu de lumière aux gens avec qui je travaille. Nous avons dans ce pays de vrais talents qui ne demandent qu’à exploser.

Et Internet ?

Je ne suis pas très bon dans ce domaine ; heureusement mon ami Silvère, que j’ai embarqué dans l’aventure du label me donne un précieux coup de main, mais soyons honnêtes je dois m’améliorer sur le sujet. Puisque nous parlons des gens autour du label, je voudrais parler de Nadia l’attachée de presse avec qui je travaille depuis la création du label et même avant. Je l’ai rencontré sur Wild Child : c’est une personne formidable qui m’a ouvert plein de portes. Elle s’est occupée de toutes les sorties. C’est une personne pertinente, de grande culture et cela me fait plaisir de travailler avec des gens comme ça.

Silvére Vincent
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Il y a de moins en moins de label aujourd’hui ?

Mon pari c’est de développer les éditions pour que les revenus du label ne viennent pas que des ventes : c’est invivable dans la situation actuelle. Si tu veux continuer d’avancer il faut vraiment avoir des revenus de plusieurs sources. Les artistes avec qui je travaille n’ont pas forcément envie en plus de faire 200 concerts par an. Je veux créer des événements pour amener les groupes dans des conditions optimales. Quand on a fait notre première soirée Twisted Soul, il y avait une salle pleine avec un programme très diversifié : Thierry Gotti, John Wayne Supermarket, Christophe Van Huffel, Space Industry et les Bad Losers. Cela a donné une couleur au label qui n’était pas un label de ressorties. Je veux que le label soit une marque et que le public y reconnaisse une qualité et une exigence artistique et culturelle. Je ne veux pas que les groupes jouent dans des endroits convenus. Chaque concert doit être un évènement.

Surtout qu’il y a une grosse proposition : il y a du monde !

Oui, c’est pourquoi moi je veux trouver un angle et je crois que le public veut du beau que ce soit artistique ou esthétique, en tous cas qu’on essaie de surprendre…

Tes projets ?

Ce sont mes deux sorties de 2023 où je vais vraiment me battre pour leur amener de la lumière et la reconnaissance qu’ils méritent.

Le mot de la fin !

J’ai envie d’être un passeur : c’est mon ambition !

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