Ça commence quand ton amour de la musique ?
Au début des années 70, j’étais pré-ado, mes parents avaient un tourne disque mais pas de disques, juste quelques albums de classiques, donc cela a commencé par la radio. J’écoutais émission de Radio Poste Restante Jean Bernard Hebey. Mon premier 45t, c’est un cadeau de mes parents en 1969 : un 45t des Beatles. J’avais 10 ans. Il ne se passait pas grand-chose. Heureusement, il y avait la presse musicale, dont une version teenagers de Best qui s’appelait Extra. Je l’achetais de temps en temps. Il y avait aussi Pop Musique Hebdo, qui sortait toutes les semaines et qui avait un grand format comme le New Musical Express. En province, il ne se passait pas grand-chose.
Tu habitais où ?
A l’époque, à Maintenon en Eure et Loir. Après on a déménagé à Sens dans l’Yonne. Je portais les cheveux un peu long au collège en 4e, ceux de 3e qui avaient les cheveux longs sont venus me voir et m’ont vraiment fait découvrir les Stones et les Stooges Avant j’écoutais un peu de tout, même du Krautrock Ah si, j’avais beaucoup aimé Marc Bolan et T Rex.
C’est quand le grand changement ?
A la fin de 1975 avec le premier album de Patti Smith qui a vraiment été marquant pour moi. C’était nouveau, il y avait une vraie fraicheur. Ce disque faisait le lien avec la Beat Génération, le R n’R, les Sixties avec Gloria Tout ça était lié. C’est très important : on lisait de la poésie, on découvrait la littérature de la Beat Génération, et aussi la musique Les Doors, et du Velvet underground Et puis Il y avait encore le contrecoup des années 60, du mouvement hippie radical de la contreculture, de mai 68... du LSD Tout ça était encore très présent. Dès l’année suivante on a commencé à écouter Doctor Feelgood, Eddie and the Hot Rods, ce genre de chose… L’année 1976, a vraiment été une année de découverte, puis cela s’est accéléré avec Les Damned, Les Saints...
Tu commences à écouter les pionniers du rock comme Chuck Berry ?
Oui et non. A ce moment-là c’est le punk qui prend de l’importance. Ça correspondait bien à notre révolte adolescente : c’était la musique de notre époque. Les grands frères de mes copains écoutaient plutôt Deep Purple ou le Pink Floyd. Avec les Rolling Stones, le seul qu’on écoutait c’était Chuck Berry. Le seul groupe de Rockabilly que j’ai écouté, c’était Crazy Cavan vers 77 / 78 On avait une méconnaissance totale de cette musique Rockabilly, on connaissait un peu Bo Diddley ou Chuck Berry, Gene Vincent Eddie Cochran, Elvis évidement.
Et donc en 1976 ?
C’était l’année de la découverte. On s’intéressait aussi aux arts plastiques. Les gens avec qui je passais du temps étaient un peu plus âgé que moi. On était à 120 km de Paris, on pouvait y aller dans la journée. On y allait en train ou en stop. On allait voir des expositions. J’ai pu voir comme ça des rétrospectives de Man Ray, Duchamp, Picabia … On allait au cinéma voir des films de Philippe Garrel pour essayer de voir Nico. On allait voir des films expérimentaux de Henri Michaux ou de Jodorowsky. Et Grâce à la boutique Harry Cover dans les Halles qui faisait un fanzine / magazine « Rock News ». Ça nous a permis de savoir ce qui se passait à Londres, New York et Paris. C’étaient les débuts du Punk Rock On s’intéressait aux avant-gardes qu’il y avait eu en France & en Europe comme Dada, les surréalistes et les situationnistes. Tout ça constituait un socle commun. Il y avait aussi en 1976, Alain Pacadis qui faisait White Flash, une rubrique dans Libération. Il avait annoncé un concert Punk rock en Déc 76 en banlieue parisienne, un peu comme un mini festival avec les Stinky Toys, Angel Face, Loose heart, Pain Head On y est allé. ce fut comme un accélérateur, toute cette énergie !!!
Tu commences quand à organiser des concerts ?
Fin 1978, à Sens, j’ai rencontré des gens qui avaient 25 ou 30 ans, un peu plus vieux que moi donc et qui voulaient organiser des concerts. J’avais 19 ans et on a commencé à organiser des concerts. C’était la leçon que j’avais reçue du punk : Do it, ou fais-le, là où tu es !
Pourquoi tu n’as pas été musicien ?
J’avais des problèmes de surdité mais je ne m’en rendais pas compte. J’ai essayé de jouer un peu de batterie en 1977. J’ai pris des cours mais j’étais tout le temps à contretemps. J’avais une bonne énergie, je me débrouillais bien mais à cause de mes problèmes auditifs j’étais à contretemps. Grave pour un batteur Je me suis donc lancé dans l’organisation de concerts. J’ai aussi managé des groupes à l’époque. Un groupe de gens très jeune « Nancy Fossoyeur » de Sens, un nom bien de l’époque… et aussi les Chiens un groupe d’ Auxerre très influencé par les Doors avec un clavier…
Vous avez fait de gros concerts à l’époque ?
Le seul concert important ce fut Starshooter sur la tournée de leur deuxième album. On était plusieurs associations ensemble. On ne connaissait pas encore cet album ( un peu décevant ) alors qu’on avait beaucoup aimé le premier. On a dû faire 700 personnes dans cette petite ville. Cela ne s’était pas vu depuis Johnny Hallyday dans les années 60 puis avec Titanic Il ne s’était rien passé depuis., des anciens m’ont raconté que pour Titanic tout avait été cassé, alors les municipalités ne voulaient pas plus entendre parler de rock & La MJC locale ne faisait jouer que du jazz rock et du folk considérée comme LA musique protestataire.
Là, tu pars à Londres ?
Oui, en 1981. on organisait un concert par trimestre et je tournais en rond. J’avais l’impression qu’il ne se passait pas grand-chose non plus à Paris où les groupes avaient peu d’endroits pour jouer.. A titre d’exemple entre 76 & 77 les Stinky Toys ont dû donner 5 concerts max à l’époque Il n’y a pas eu l’explosion d’une scène. C’est pour ça que je suis parti à Londres pour vivre ça au quotidien.
Et c’était comment ?
J’ai vu 3 à 4 concerts par semaine pendant 1 an et je sortais tous les weekend. J’allais surtout dans les pubs ou la programmation était plus pub- rock, R n’ R, Néo rockab, le passage des Stray Cats avait laissé des traces, et faisait un lien avec le Punk rock. Il y avait beaucoup de revivals ans tous les domaines, c’était aussi le cas du Punk, avec le punk not dead, mais c’était pas vraiment m’a tasse de thé. J’ai vu le 5e anniversaire des Damned (great) et c’était déjà une reformation !
Je gardais un esprit d’ouverture, par exemple en allant voir les Loundge Lizards groupe de John Lurie j’ai découvert en 1re partie Birthday Party, ou encore Tuxedo Moon, le 1er concert des Lords of the New Churh pour voir Steve Bators des Dead Boys avec Brian James, fabuleux, les Cramps & les Meteors bien sûr… Et tous ceux que j’oublie.
Tu te sentais à l’aise ?
Oui et non. Ce n’était pas ma culture, pas ma langue, ni m’a façon de penser. J’étais européen mais je me sentais immigré Je faisais beaucoup d’emplois dans la restauration et le nettoyage… des boulots de merde… Donc j’ai eu envie de revenir en France et comme j’avais toujours habité dans des villes moyennes, j’ai eu envie d’aller à Paris.
C’est là que tout a commencé ?
J’ai d’abord eu envie de faire un fanzine. On l’a commencé avec le fan club du groupe Meteors. J’aurai bien voulu le faire avec les Cramps mais c’était déjà pris.
Il s’appelait comment ce fanzine ?
Creepy Crawly, il a duré de 1982 à 1983 pendant un an environ. On a fait cinq numéros. Le premier a tiré à 100 exemplaires et les numéros 4 et 5, ont tiré à 1000 exemplaires vendus. Le premier numéro a été consacré aux Météors et dès les numéros suivants c’étaient très larges : Rock 60’s garage, punk rock, rockabilly… mais aussi des Bd, des nouvelles, des reportages au Père Lachaise à la foire du trône.
Tu commences quand à organiser des concerts à Paris ?
Avec ce fanzine on s’est mis à parler d’une scène qu’on ne pouvait pas voir à Paris, une scène londonienne. J’avais sympathisé avec le groupe Sting Rays à Londres. J’avais vu leur premier concert et cela m’avait plu. Six mois après, je les ai fait jouer à Paris au Gibus avec les Coronados. L’année suivante en 1983 avec ma copine Sara Jane R., on a organisé la première tournée des Météors en France. Il y avait une dizaine de dates dans toute la France et trois dates à Paris dont une à Vincennes au Théâtre Sorano. On s’était rendu compte qu’une partie du public qui aimait la musique des Météors, était ce qu’on pourrait appeler la Raya. Un public qu’on retrouvait aux concerts de la Souris Déglingué des Wampas et aussi dans les Squats. Les Météors faisaient venir des punks, des skins, des Teds, des Cats… un vrai melting pot. Le Gibus ne voulait plus de ce public, donc on avait organisé ce concert à Vincennes pour ce public. Il y a eu les deux soirs de suite…au Gibus ! Comme tout le monde avait payé sa place, ils ont laissé entrer tout le monde !
Et donc ?
Le Gibus était bourré à craquer mais il y a eu des turbulences dans le quartier. C’était un peu chaud même si ce n’était pas très méchant. Donc le Gibus m’a fait comprendre « toi et ton public on veut plus vous voir » !!! Un an plus tard 1984 je monte la tournée française des Sting Rays, je me suis retrouvé sans concert à Paris. Je n’avais pas les moyens de louer une salle et personne n’en voulait … peut-être à cause de leur étiquette Psychobilly qui leur collait à la peau et à moi aussi. Entre-temps J’avais connu Ronan Omnes, un prof d’arts plastiques, à travers notre fanzine et des Météors, parce qu’il aimait bien cette musique et l’esthétique du fanzine (lui-même avait fait en fanzine vers 77 / 78 du nom de Scalpel) Il (Ronan) a trouvé un café au 104 rue de Bagnolet à Paris « Chez Jimmy ». On a fait le concert dans ce café. Cela ne s’est pas trop mal passé même si les conditions étaient précaires. On a remis ça deux semaines plus tard dans le même café avec le groupe de Mike Spenser : The Cannibals !
Pareil que pour les Sting Rays ?
Exactement pareil : ils avaient une tournée Française et pas de dates à Paris. Ils ont joué dans le bar et c’était compliqué juste une ampoule au plafond, 2 palettes et un bout de moquette pour la batterie, pas de sono, un ampli basse pour la voix. A l’extérieur il me semble, il y a eu quelques histoires, des embrouilles rien de plus. Quelques bandes se sont croisées par hasard dans la rue. On ne pouvait pas tout maîtriser et en même temps dans les années 60, 70 les concerts dans les bars ont toujours viré à la bagarre, à la baston.
Vous avez quand même continué ?
On a d’abord fait une pause. On a réfléchi et on s’est demandé pourquoi à Paris, dans les années 70, il n’y avait pas eu l’explosion d’une scène. On a regardé ce qui s’était passé à Londres et on s’est dit : « si on peut développer une scène locale, Paris et banlieue, on doit trouver un lieu, une scène, qui reçoit des groupes le même jour de la semaine et à la même heure. Il faut que ce soit les mêmes groupes qui jouent souvent pour leur permettre de jouer mais surtout de créer un public. ». Créer un espace de diffusion pour faire exister une « scène ».
Et donc ?
Avec Ronan, on a créé une association déclarée en préfecture : Paris-Bar-Rock à l’automne 1984. Pour éviter des problèmes d’alcool le samedi soir, on a fait des concerts le dimanche après-midi à partir de 17 h, bien plus tranquille, tout en essayant d’en faire un toutes les semaines. Ça a commencé comme ça. En plus, j’étais devenu manager des Wampas un an avant.
Tu nous racontes.
Ils m’avaient contacté. Ils n’avaient encore pas fait un seul concert. Ils savaient que j’organisais des concerts et des tournées. Je suis allé les voir avec des copines dans leur local de répétitions vers Argenteuil. Ils venaient de ce coin-là. Et ça m’a plu tout de suite, le melting pot d’influence, les paroles … tout quoi ! Pour les Météors et les Sting Rays, on cherchait des premières parties, c’est comme cela que je me suis intéressé aux groupes locaux Paris et en Ile de France. Par la suite on s’est rendu compte très vite, avec Ronan, du potentiel de groupes qu’il y avait. C’était assez incroyable. La plupart n’avaient jamais donné de concerts, on allait souvent les voir en répet’ et on recevait des cassettes, mais alors vraiment beaucoup de cassettes…
Pourquoi Rascal ?
C’était lors de la signature pour l’édito du N° 1 de notre fanzine Creepy Crawly, j’ai signé Rascal et c’est resté !
Il y a toute une scène qui va apparaître grâce à vous : Dalton, Wampas, Soucoupes Violentes… Vous allez permettre à ce qui va devenir le rock alternatif d’exister !
C’est une certaine histoire du rock en France qui va nous assimiler au rock alternatif, car nous étions là durant la même période. On était en 1984 et le milieu rock alternatif en devenir était autour de Marsu, des Bérus et du Label Bondage, nous étions à la marge, taxé de « rockisme », qui aime encore le R n’Roll, musique du passé. Mais d’en notre démarche il y avait un mélange de DO IT ! (60’s) de Do It Yourself (DIY Punk 77) et un petit côté frondeur et libertaire. Concernant l’apparition d’une scène, c’était le but du jeu. On en avait conscience parce que c’était réfléchi ! On avait cette envie de développer une scène locale. J’avais vu à Londres une expérience encore toute fraîche de Mike Spencer. Son groupe était une école. Il y a eu des dizaines de musiciens qui sont passés dans les Cannibals et qui revisitait le Rythm’n Blues dans une veine garage punk. Mike Spencer organisait des soirées et à chaque fois il y avait au moins les Sting Rays, les Milkshakes ou les Prisonners ! Je trouvais cette expérience intéressante : un groupe confirmé qui avait un public et du matériel, qui permettait à un public de voir des groupes moins confirmés, voire débutants.
C’était un peu ça l’idée de Paris Bar Rock. Mais on n’était pas dans le revival, pas dans le passéisme. Même si les groupes que tu as cité avaient leurs influences dans les années cinquante ou soixante, le punk rock était passé par là et ils jouaient cette musique avec cette énergie. S’il y a un point commun entre tous ces groupes : il est là ! Et on était bel et bien dans les 80’s ! Dans mon souvenir les Cherokees ont fait leur premier concert avec nous, pareil pour les Washington Dead Cats, mais on a fait aussi des groupes de rockabilly, ska, Mods, punk rock… C’était varié.
C’était donc la bonne formule ?
Oui et Non car cela restait très précaire. Oui, trois groupes et un backline commun si possible. Au début c’était prix libre mais on avait peu en caisse, alors on a a décidé de faire un prix minime. L’accord avec le bar était simple : ils avaient le bar pour eux et nous les entrées pour rémunérer les groupes. Bon, ça n’a jamais été rémunérateur, cela permettaient juste aux groupes de jouer, de se confronter à la scène.
Vous avez vite changé de lieu ?
On a tenu environ 1 An. On a tout de suite eu des problèmes de bruit et de voisinage même un dimanche ! Alors Passé 22h, c’est pire. Faire un concert dans un bar c’est compliqué. Il faut mettre les amplis au même niveau que la batterie et mettre la voix au niveau de l’ensemble pour éviter que ce soit trop fort., mais bon il n’y a pas grand-chose à faire cela reste des musiques amplifiés. Il y a eu une fermeture administrative, c’était pas possible de rependre sans mettre l’établissement en danger. Bon il me semble qu’à travers de ce 1 er lieu ce fut un véritable bouillon de culture, un accélérateur, qui a vu éclore de nouveaux groupes et des projets, et la présence de plasticiens autour de Ronan était fondamentale, pour les flys, le mini zine, les fonds de scène. Un état d’esprit qui perdure encore presque 40 ans après.
Et vous avez fait comment ?
Ronan avait l’habitude de faire des grandes promenades déambulatoires dans un Paris populaire en train de disparaitre, et il a repéré ce café rue de Buzenval paris XXe « l’Auvergne » qui avait une arrière salle, qui avait servi à une époque à des banquets pour la Police. Le café était en perte de vitesse, et la patronne ne pouvant pas prendre sa retraite à accepter de nous accueillir.
Entre temps François du groupe Pigalle, et futur Garçons Bouchers nous avait rejoint comme sonorisateur, et non pas comme videur comme cela a souvent été dit à tort. Ça a commencé à prendre de l’ampleur, certains soirs il pouvait y avoir entre 200 et 300 personnes. Une fois de plus il y a eu des problèmes de voisinage, le simple fait d’attroupement sur la voie publique dérangeait. Nous avons décidé d’arrêter pour éviter une fermeture administrative et d’absence de revenu pour la patronne.
Ça avait évolué ?
Dans le premier café, selon moi, c’étaient plus des musiciens qui allaient voir d’autres musiciens.
Et ensuite ?
On a continué en 1986 dans un cinéma à Belleville, le Berry, qui est devenu ensuite le Zèbre. Là, j’ai été moins impliqué, j’avais besoin de prendre du recul. Je ne m’y retrouvais moins, j’aimais cette ambiance des cafés, différentes des Pub rock il y avait plus de besoin de promotion, de sono, de sécurité, de logistique quoi et il a fallu installer un bar… Tout s’est recentré autour de Ronan & Mickey qui était présent depuis chez Jimmy et de Viviane Tasca et d’autres… Le cinéma n’était pas en conformité. On a trouvé une parade, comme dans « la Dernière séance », d’Eddy Mitchell, les groupes étaient l’attraction avant la projection d’un film. Il n’y avait que des films de séries B ou Z. Le premier film était « L’invasion des vers géants » (rires). Rapidement il n’y a plus de film et en moins d’un an de fonctionnement on a eu une nouvelle fermeture administrative.
Et ensuite ?
Entre temps il y avait eu des concerts plus importants à L’Eldorado, au Rex, et rue de Doudeauville dans un club dédié au Jazz. On s’est tous un peu dispersé, certains avec des projets différents. Avec Ronan, on a voulu garder cet esprit Bar Rock. En 1987, l’association, s’est appelée les Barrocks. Il y avait un jeu de mots dans Paris Bar Rock, avec Paris comme la ville mais aussi Pari, comme un défi, comme si c’était possible. Le concept Baroque vient de Ronan qui estimait que ces groupes étaient capables de perles irrégulières On a relancé les Barrocks dans une salle de quartier, qui était fermée à l’époque mais qui est très connue maintenant : La Bellevilloise !. On voulait un peu, un principe de cabaret ou l’on pouvait être assis avec une piste de danse, une scène avec des groupes et des artistes. cela ne s’est fait qu’une seule fois à La Bellevilloise.
Là vous déménagez encore ?
Oui, on quitte nos quartiers historiques et bastion populaire du 19e & 20e arrondissement et de 1987,à 1988 on va à Pernety rue Raymond Losserand dans le 14e. C’était une salle paroissiale qu’on louait à des curées, que l’on devait payer cash en liquide et au black, véridique. Il commençait à y avoir un décalage : j’approchais de la trentaine, j’étais déjà père de famille et d’autres comme Ronan approchaient la quarantaine. Notre public était né dans les années 70 et il y avait une grosse demande par rapport au Hardcore. On a donc fait une ouverture musicale sur cette musique dans notre programmation. On a aidé quelques jeunes à se structurer pour faire leur propre association de Hardcore, « Elastic Crew » ; et puis il y avait aussi le développement du Dub avec des Sound Systems pirates du Rap évidement. A l’époque je suis allé voir Rum DMC & Beastie Boys. Le dernier concert des Barrocks à Pernety a eu lieu en juin 1988 et à l’automne suivant on était à la rue. Ronan a décidé d’aller au Gibus et moi j’ai dit non, je ne voulais pas retourner là-bas.
Tu as produit des disques à l’époque ?
Deux 45 t, le premier Wampas en 1984 et le premier Daltons dont j’étais aussi manager en 1985. On avait monté un label en gardant le nom du fanzine, Creepy Crawly et ça n’a pas été plus loin.
Il y a eu beaucoup de groupes qui ont commencé dans les Barrocks ?
Dans les tout débuts oui certainement, par la suite je ne sais pas, manque de mémoire, en plus.
J’ai donné toutes mes archives à l’association pour les 10 ans des Barrocks en 1994. A chaque concert, on faisait un petit flyer qui précisait « support your local band ». Mais bon je me souviens qu’un groupe comme Parabellum n’avait jamais eu l’occasion de jouer et nous avons organisé leur cinq premiers concerts.
Pourquoi tu t’arrêtes ?
Je ne pouvais pas retrouver l’état d’esprit de nos débuts en allant au Gibus. J’allais avoir trente ans, j’étais père de famille, je voulais un emploi stable, me professionnaliser après 10 ans (78 / 88) d’associatif et de bénévolat. Retournez Au Gibus ce n’était juste pas possible (rires).
Tu te rends compte de l’importance que tu as eu ?
Non car c’est grâce à un ensemble d’acteurs qui fait que cela a été possible. Je n’étais pas seul, il y avait aussi Ronan et des équipes qui se sont sans cesse renouvelées. Quand Ronan a aussi quitté Paris, ça a continué avec de nouvelles équipes qui se transmettent régulièrement le flambeau. L’équipe actuelle organise un concert de soutien le 19 Février 2022, et devrait fêter les 40 ans des Barrocks en 2024 si tout va bien, respect !
Et la suite pour toi ?
En 1989, j’ai décroché un contrat de six mois chez un jeune producteur de spectacle et de concerts : Patrick James de Lemming productions. Il avait l’intention de produire des concerts sur Paris mais il avait besoin aussi de faire tourner les groupes. J’avais une expérience, de tourneur de booker notamment avec les Wampas, Il faisait beaucoup de New Wave, avec Dancetaria et les débuts de PIAS. Il était proche aussi de Bondage et moi de New Rose. Chez un producteur je pouvais garder mandat que pour m’occuper que d’un seul artiste, donc j’ai gardé les Wampas avec moi. Deux semaines après mon arrivée, les Bérurier Noir nous ont contactés pour organiser leur tournée, et devenir intermittents du spectacle, c’est devenu mon activité principale, il y avait beaucoup de pression médiatique autour d’eux, et les groupes dit alternatifs commençaient a devenir un enjeu pour les majors, tous ces disques vendus sans leur contribution, un truc leur avait échappé, grave. Et les Bérus sont entrés en procès avec bondage pour leurs royalties.
Tu les connaissais ?
Assez peu en fait, mais on se connaissait de vue, depuis Les Wampas je connaissais surtout Marsu leur manager. C’était un peu la fin d’une époque, j’avais besoin de tourner la page, alors au niveau familial on a décidé de quitter Paris au début de l’été 1989, pour une meilleur qualité de vie en province, loyer abordable, logement plus grand, espace vert. Nous sommes partis à Bourges, car j’avais des projets en commun avec l’ association Emmetrop. A la fin de l’année suivante, en 1990, on a commencé à développer un lieu alternatif, sur une friche industrielle à la campagne à 10 km de Bourges avec notre propre association C’est « Comme ça ! » une aventure qui durera jusqu’en 1998, avec au fil des ans, la création d’un local de répet, d’un café associatif, d’une salle de spectacle de 170 places au norme ERP ( établissement recevant du public) après plusieurs fermetures administratives, bien sûr. A partir de 1992, nous participerons à la fondation du REAS (réseau pour une économie alternaive & solidaire sous forme de coopérative). Les Wampas viendront y jouer 2 fois, Schultz de Parabellum aussi 2 fois avec Les Tontons Flingeurs son groupe de swing, avec une multitude de groupes locaux, UP, Musty Berry Guys, Zygomatic Zone, Boingtones, Cesar Romeo... et venus d’ailleurs Cherokees, Scalpers, Mescalros, Daredaredevils, Red Jack, Tom Buzz, Space beatnicks et The A Bones de New York ! Nous y accueillerons aussi le 1er festival Cosmic trip.
Spécial dédicace baroque à : Ronan, Mickey, Marshall (RIP), Valérie, Vivianne, Sara Jane, Claude C, Sergio, François sono (Fontainebleau), François HL de la Boucherie, Charlotte, mes frangins Xtoff & Sylvain, Jeanne, Dédé, Riri & Thomas, Ramone, Gégé, Patty & Bruno, et à tous ceux & celles Des Barrocks que je n’ai pas connu !!!!