Vous sortez un nouvel album musicalement différent du premier, qui était très rock, alors que celui-ci est très psychédélique. Que s’est-il passé ?
Lucas : C’est évolution naturelle ! Ce que l’on écoute et ce que l’on joue évolue. On a fait aussi la musique d’une pièce de théâtre qui s’appelle « Electre des bas-fonds » que l’on joue sur scène avec les acteurs et dans le cadre de cette pièce, on est appelé à faire beaucoup plus de longueurs que l’on avait l’habitude de faire. On était sur un format de chansons de trois minutes et là on nous demande parfois de faire des morceaux de dix minutes pour accompagner les acteurs. Cela amène une autre façon de composer et d’écrire en groupe, sur d’autres gammes que l’on utilise d’habitude. Il y a vraiment un lien entre les deux activités : le groupe et le théâtre.
Vous aviez quoi en tête en faisant cet album ?
Baptiste : On voulait être en phase avec le live. Quand on a enregistré le premier album, on voulait faire des morceaux très travaillés qui sont des belles chansons. Là, on voulait vraiment retrouver ce côté groupe de live et que nos chansons sonnent en concert. C’est ce qui a donné ce côté plus brutal, plus psyché, avec des moments plus longs et des instrumentaux. C’était la volonté d’avoir un album qui allait vraiment donner envie aux gens de nous voir en live.
Djivan : Sur « Strange effect », notre précédent album, toutes nos chansons quand elles sont jouées en live sont rallongées avec solos ou des phases instrumentales pendant les couplets / refrains. Là, on voulait garder ce côté belles chansons mais avec l’énergie du Live.
C’est un album qui est beaucoup plus produit que le premier. C’était une volonté de Liam Watson, votre producteur ?
L : C’est la volonté de tout le monde ! On a toujours voulu avoir plus d’arrangements mais là on a eu plus de temps que pour le premier. On a beaucoup impliqué Liam, le producteur, dans le processus de création dans la mesure où il organisait le tout. Au bout du compte, il est presque devenu membre du groupe tant il s’est impliqué.
D : Avant d’enregistrer le disque, je voulais vraiment travailler sur les voix par exemple… C’est quelque chose que l’on délaisse parfois. On mettait une réverbération et ça marchait. Là, on avait envie d’expérimenter, en mettant des voix dans des amplis par exemple, avoir plus de couches, mais aussi de travailler les instruments séparément et que les morceaux sonnent tous différents.
Vous participez à des tas de projets différents, comme les Nobels, vous faites du théâtre, vous avez joué dans un feuilleton à la télé (Romance, NDLR)… Est-ce que toutes ces expériences vous ont aidé pour ce disque ?
B : Ça fait partie de notre parcours de musiciens mais aussi d’artistes parce qu’on compose des chansons tous les trois. Jouer avec d’autres gens, dans d’autres conditions, ça nourrit vraiment notre musique.
D : Le théâtre m’a fait travailler l’oreille par exemple, bien plus que la dextérité de mes doigts. On a l’habitude de jouer ensemble, on se connait très bien. On devine ce que l’autre va faire. Mais quand tu es à trente sur scène et que dois suivre un texte tu es obligé d’écouter ce qu’il y a autour de toi et ce que les autres jouent. Ce sont les expériences et les influences qui te font grandir. Tu es obligé d’apprendre de nouvelles choses pour t’intégrer au groupe, au projet et à l’œuvre.
Vous allez faire comment sur scène par rapport à cet album qui est très produit ?
L : Le passage sur scène implique un changement. Ce n’est pas intéressant de refaire sur scène ce que l’on fait sur disque. Si tu vas voir un groupe, c’est dommage quand il refait l’album. Il y transposition ! On est trois et cela implique des choix pour jouer les morceaux sur scène.
D : Quand on a enregistré le disque, on est arrivé avec quelques idées de production. On est arrivé avec des chansons que l’on pouvait jouer à la guitare acoustique et que cela marche. Elles fonctionnent toutes par elles-mêmes ! On n’aime pas les groupes qui jouent avec des bandes ou au clic pour garder la même production que sur l’album en live. J’aime voir les gens jouer sur scène sans refaire forcément le disque.
Vous n’avez pas envie de mettre un clavier avec vous sur scène ?
B : La question se pose parfois mais ça nous ferait tellement bizarre, on est habitué à jouer ensemble !
Vous avez beaucoup de promotion sur le groupe en ce moment. Vous allez emmener dans votre sillage des groupes dont vous êtes proches comme les Waves Chargers ? Vous êtes les premiers de cette scène à avoir une telle exposition.
D : Peut-être, mais c’est cool en tout cas que l’on soit les premiers. La scène parisienne et française est très riche ! Cette émulation devait arriver tellement il y a de bons groupes. Dès qu’on a l’occasion, on joue avec eux. Par exemple pour notre dernière Maroquinerie il y avait Alvilda avec nous, là on va jouer After Geography. On aimerait bien jouer avec tous ces groupes : on se connaît tous et ce sont nos potes !
Vous allez jouer à l’étranger ?
D : On a déjà beaucoup joué à l’étranger.
B : On va essayer d’y aller dans de bonnes conditions. Pour l’instant on va tourner en France au printemps, on espère avoir des festivals cet été.
L : On va essayer de faire la French Invasion aux USA (rires).
Il parlent de quoi vos textes ?
L : Il y a un terme récurrent sur ce disque, c’est l’inconscient, le rêve, les incantations et tout ce qui va avec. C’est venu naturellement, on n’a pas choisi mais les chansons parlent toutes de ça !
B : Quand tu t’emmerdes pendant deux ans pendant le confinement, tu es obligé de parler de ça : de l’évasion !
L : C’est pour ça que l’on a choisi d’appeler l’album « Half Asleep Half Awake ». C’est aussi pour ça qu’on a fait une pochette avec une Intelligence Artificielle.
C’est bizarre pour des gens comme vous, qui êtes analogique, d’avoir pris une IA ?
B : Ce qui est bien avec l’analogique, et qui nous plaît, c’est que tu ne sais pas toujours ce qui va sortir sur la bande. Il peut y avoir des fréquences différentes, des pains… L’IA représente assez bien ça parce qu’il y a une part de hasard. Par exemple, il y a un chat dans la boule de cristal et ça on ne l’a jamais demandé.
D : Ça va bien avec le thème de l’album, ce genre d’éléments, capable de produire des trucs mais qui ne sont jamais conscients. Lucas est graphiste, il a mis le projet en place et c’était rigolo de voir le résultat.
L : On travaille souvent avec du vieux matériel mais on essaye surtout pas de se maintenir à une époque. On fait ce qu’on sait faire et ce qu’on veut faire !
Vous pouvez maintenant, musicalement allez où vous voulez après un album pareil ?
L : Tout à fait !
B : On a trouvé une bonne zone de création et je pense qu’on va y rester un moment. Avec cet album, on a vraiment commencé à définir notre identité musicale et elle est bien installée.
L : On a trouvé une forme de liberté en écrivant sans contrainte et en restant dans un univers.
D : On est en train de monter un studio et quand il sera prêt on passera beaucoup de temps à enregistrer.
On vous entendra jamais chanter en français ?
B : Il ne faut jamais dire jamais ! (rires). Ce sont deux façons différentes d’écrire, anglais et français. Avant de le faire, il y aura beaucoup d’essais.
D : La musique que l’on joue, elle est majoritairement en anglais mais on peut tout faire.
Mais vous n’avez aucunes influences françaises ?
D : Un peu mais généralement ce que l’on écoute en Français est directement inspiré des anglais.
L : Moi, j’aime bien Air même si ça ne se sent pas vraiment dans notre musique.
Vous êtes un groupe qui donne envie de redevenir fan avec tout ce que cela implique : les collections de badges, les éditions limitées. Vous êtes un groupe de fan pour fan !
B : On est des fans de musique mais pas vraiment de groupes. Je n’ai jamais été les genre à collectionner les photos ou les T-Shirts.
D : Moi c’est pareil, quand j’aime j’achète les disques.
Vous voulez dire quoi pour la fin !
B : Venez aux concerts
D : Oui, venez aux concerts et pas que de nous ! Il faut soutenir la scène locale parce que tout le monde galère pour vendre des disques ou des places de concert. Allez-y, dans votre ville, soutenez la scène locale. Il y a des festivals qui s’en sortent mais les plus petits galèrent et il faut les supporter. Je n’ai pas envie de payer 60 balles pour voir des artistes que l’on voit tout le temps.
Quel disque donneriez-vous à un enfant pour l’emmener vers la musique ?
B : Johnny Burnette
L : Sergent Peppers des Beatles
D : Le premier disque que j’ai écouté et que j’ai adoré c’est le deuxième album de Bob Marley ou Queen, c’est super pour un éveil musical !