L’album de Frakture est sorti juste avant le premier confinement. Comment cela se passe-t-il aujourd’hui ?
Sergeï Papail : Oui.Ça paraît déjà loin parce que la crise sanitaire a étouffé cette sortie. C’est très frustrant. Tout notre plan de promo, comme tous les artistes, s’est effondré, même si nous avons eu une belle, mais brève, reconnaissance de la presse qui a eu le temps de se pencher sur l’album, je pense à Rolling Stones et Gonzo notamment. Mais il ne faut pas prendre ça comme un coup d’épée dans l’eau. So Blind To See est un album intemporel, et je pense que tôt ou tard il refera surface. J’espère en tout cas. Donc, comme tous les artistes, nous continuons de travailler, même si, pour l’instant, nous ne pouvons faire de scènes. Nous avons eu plusieurs concerts annulés. Steve Hewitt (Placebo N.D.L.R.) nous avait proposé, en février, de faire son support tour, au moins pour sa tournée française, avec son groupe Love Amongst Ruin à la fin de cette année. Tout cela est tombé à l’eau pour tout le monde. Heureusement, et si tout se passe bien d’ici là, nous serons en concert avec Minimal Compact en octobre prochain à « l’Étage » à Rennes. Tout le monde de la Culture est en berne avec cette saloperie. Mais il faut continuer de se battre, de créer, d’échanger au milieu de cette frustration. Regarder devant. Et plus loin. Le seul « avantage » de cette crise sanitaire est qu’elle aura provoqué, chez beaucoup d’artistes, un plus grand repli sur soi, qui peut être propice à d’autres formes de créations. Mais il va falloir tout réinventer.
Ce premier album vient de sortir 43 ans après votre formation, mais avec une interruption de 35 ans.
Sergeï Papail : Oui 43 ans… C’est tard, mais ça a été une question d’opportunité, que nous n’avions pas à l’époque. Mais aussi de maturité. C’est tard, c’est vrai, mais ça existe maintenant et tant mieux.
Quand on écoute votre album deux choses viennent à l’esprit : un son moderne mais aussi très rennais de « la grande époque ». N’est-ce pas l’album qu’un groupe rennais de cette époque devait sortir maintenant.
S : Non, je ne pense pas.
Pascal Karels : Moi non plus, la datation me gêne. Pour moi c’est un album intemporel. C’est très prétentieux. Quand tu fais un album il faut que cela parle à tout le monde avec un son moderne et des morceaux qui tiennent la route.
Concernant la genèse de cet album : il est venu comment ?
P : Le premier titre était là depuis trois ans, d’autres deux ans, et un depuis un an. L’album ne comprend que des titres qui se sont construits sur la durée.
S : À l’exception de Flies qui était déjà sur notre EP en 2017 et dont on a fait une version remaniée. On voulait reprendre ce titre parce qu’il représente beaucoup pour moi. C’est un titre très provocateur dans la musique et le texte, c’est-à-dire les racines de Frakture. On a pris beaucoup de plaisir à le faire parce qu’il claque vraiment. En dehors de ça, l’album est très éclectique.
Mais vous venez du punk qui était surtout une énergie, une façon de jouer ?
S : Le punk a été pour moi une libération dans l’expression musicale. Au sortir de l’adolescence, j’étais révolté, je voulais m’éclater, et le punk m’a permis d’exprimer tout ça. Un côté politique aussi. Avant le punk, la musique et la vie en général m’emmerdaient.
P : Le punk m’a libéré, musicalement surtout. C’est ce qui m’a permis de faire un groupe sérieusement. J’avais en moi un quadrilatère : Led Zep, Hendrix, les Stones et les Who. Musicalement je ne pouvais pas me rapprocher de ces gens-là. C’était impensable de faire quelque chose de comparable, et puis quand le punk est arrivé, j’ai pu jouer. Attention, pour moi, le punk ce n’était que du rock. Pas plus pas moins. Mais au moins on était libéré techniquement.
Pourquoi les autres morceaux du maxi 45 t ne sont pas là ?
S : Parce qu’on faisait un nouvel album. Pas une resucée du EP qui, lui, représentait une forme d’urgence.
Mais ce EP vous a permis de vous lancer sur cet album ?
S : L’urgence était, qu’à l’époque, Republik (le groupe de Frank Darcel N.D.L.R.) avait sorti un album. Les Nus (autre groupe Rennais de la grande époque N.D.L.R.) aussi. Donc nous devions faire quelque chose nous aussi. Nous avons fait l’album avec une autre logique, plus artistique et plus réfléchie.
So Blind To See est un album intelligent, libre et artistique ?
S : Intelligent ! (rires). Réfléchi plutôt. Libre aussi. Il s’appelle So Blind To See. J’avais proposé également qu’il puisse s’appeler Geisha’s Noises (un autre titre de l’album). Il a été produit par Dave M. Allen, le producteur historique de The Cure. C’est finalement lui qui a tranché sur le titre de l’album, et qui a définit l’ordre des morceaux, pour créer deux univers sur le vinyle, avec une « Broken side », plus rythmique et une « Sad side ». Il est sorti le 6 mars en distribution nationale chez Coop Breizh. Dans cet album je me suis laissé porter par d’autres sensibilités qui ont emmené ma voix ailleurs, et modifié mon approche harmonique, ma façon de jouer.
Quand on parle de Marquis de Sade, on parle surtout de Philippe Pascal, décédé l’an dernier. Même si je sais que cela est douloureux pour toi Sergeï, il faut en parler…
S : Dans le livret du CD, il y a une page vierge avec juste deux phrases d’un des titres de l’album. (Lourd silence). Ces mots sont pour lui.
C’est qui Frakture à l’heure actuelle ?
P : Un bassiste chanteur, une bassiste, Laureline Prodhomme, un guitariste. Oui nous avons deux bassistes et c’est inédit !
Laureline, tu es bassiste de Frakture avec Sergei. C’est quoi pour toi la musique de Frakture, toi qui viens de groupes comme Candie Prune ou Théo Hakola ?
Laureline : C’est une drôle de question car elle sous-entend qu’il y a un lien entre Candie Prune, Théo Hakola et Frakture ! En fait, tout ça c’est une histoire de rock et de rencontres. D’ailleurs, je joue toujours avec Théo Hakola (depuis 2001). Je fais aussi - et surtout - partie de deux autres groupes : The Dude, et Versari. Frakture ? Post punk, power trio, pop’n roll… Pour moi tout ça c’est du rock, de la musique brute et sincère qui se partage et se vit. Quand tu penses à Frakture, tu fais tout de suite le lien avec Marquis de Sade et Marc Seberg et c’est une belle page de l’histoire du rock.
Comment as-tu intégré le groupe ?
L : Quand Sergei m’a invitée à les rejoindre, j’ai été séduite par l’idée originale de jouer à deux basses. C’était une expérience nouvelle pour moi. En plus, j’adore le jeu de Pascal, hyper senti, inspiré et sauvage. Et deux basses ! Comment ne pas se laisser tenter par l’aventure ? J’ai pensé que c’était une idée audacieuse d’essayer de construire quelque chose avec ça, sachant que Sergeï et moi avons un style de jeu très différent, lui a plusieurs basses qui comptent plus de quatre cordes, alors que moi, je dis souvent que deux suffiraient !
L’album était déjà enregistré, je n’y ai pas participé. Ils m’ont donc invitée à les rejoindre pour adapter les morceaux pour le live, avec l’envie de créer quelque chose de nouveau, de m’approprier leurs compos et d’apporter ma « patte » en les retravaillant, avec l’idée de laisser chacun trouver sa place. Et ça se fait assez naturellement finalement. Nous sommes en train de créer quelque chose ensemble, même si, malheureusement, les concerts s’annulent les uns après les autres depuis mars.
Des rumeurs disent que vos morceaux sont tellement complexes qu’il faut deux bassistes pour les jouer ?
P : En partie vrai et en partie faux. Il y a surtout une nécessité de coller à l’ambiance de l’album même si en live cela ne sera jamais pareil que sur l’album, et c’est tant mieux. On y a beaucoup réfléchi et Sergeï voulait être moins contraint par son instrument.
S : Oui la raison est là, davantage que la complexité. Cette idée m’est venue quand j’ai écouté le résultat final de l’album. Je me suis dit qu’il fallait que je me concentre davantage sur le chant et les interprétations. Il fallait traduire de manière simple tout le travail de Dave sur l’album. Donc je devais me concentrer sur ma voix, travailler davantage ma basse dans l’environnement harmonique, et laisser le socle rythmique faire son travail de manière plus soutenue. Et Laureline est parfaite dans cet exercice. Elle est avec nous depuis un an et demi et elle est devenue notre petite sœur et notre pilier ! En plus elle chante. Nous avons donc tous les ingrédients pour coller au plus près de l’ambiance de l’album.
Sergeï, te considères-tu encore aujourd’hui comme un artiste rennais ?
Je ne sais pas. J’ai beaucoup de reconnaissance, plutôt de nostalgie, pour ce que m’a apporté la musique à Rennes. C’est grâce à Rennes que j’ai pu perdurer dans ce que je fais actuellement. Mais, de ces années-là passées, qu’en est-il resté ? On a toujours été en background, et on ne peut pas dire que beaucoup de gens nous ont aidés, ou en tout cas sont restés à nos côtés. Ils se comptent sur les doigts de la main. Il y a bien sûr des gens comme Etienne (Daho) ou Frank Darcel, et Philippe (Pascal) lorsqu’il était encore là. Et d’autres qui se reconnaîtront. Mes contacts et mes relations en général, aujourd’hui, sont de plus en plus de l’autre côté de la Manche depuis que nous avons travaillé avec Dave Allen. Et je peux te dire que les Anglais sont beaucoup plus francs et sincères.
Pourquoi ?
Ils ne s’embarrassent pas avec les flatteries et les caresses sur l’épaule des soirées bien pensantes. Tout est franc et cash. Ils raisonnent avec leur feeling. Et ils sont honnêtes surtout, du moins les gens que je côtoie. Ils ont travaillé avec nous alors qu’ils ont déjà bien à faire chez eux. Je trouve ça courageux de leur part (rire) ! Mais c’est bien la preuve qu’ils n’abordent pas les mêmes questions de connivence qu’en France. Pose la question à T21 pour savoir s’il se considère comme un groupe français. Ils font un tabac à l’étranger et même pas une ligne dans la presse française… Alors si tu t’enfermes à Rennes… La nostalgie a des limites. C’est une des raisons pour lesquelles les Anglais et les Américains sont les meilleurs. On a rencontré Steve Hewitt (Placebo N.D.L.R.) en février dernier avec Karels. Tout s’est passé très amicalement. On a siroté quelques verres et il nous a proposé spontanément de faire la tournée avec son groupe Love Amongst Ruin. T’imagine ça en France ? Combien de cases à franchir pour te faire adopter par le « milieu » ? Donc… Rennais ? Pas Rennais ? 40 ans après c’est le dernier de mes soucis. Si on nous programme à Rennes on le fera pour les gens qui nous aiment. Pas plus.
Fraktureest un groupe culturel qui a toujours suivi sa voie. Ne pensez-vous pas que la production de Dave Allen ne vous enferme ?
P : Pour moi, non. J’avais un peu peur au début, avant son travail. Mais au résultat final non, parce que c’est très ouvert. Il a créé des espaces qui nous offrent de vraies libertés pour le Live.
S : Dave ne nous a jamais conduits vers un son hermétique, ni jamais enfermé personne dans son instrument. Il a gardé la même logique que lorsqu’il travaillait avec The Cure. Il prend l’existant et en tire la quintessence. Il te donne des clés pour aller plus loin, réfléchir sur le fond de la composition. On a beaucoup discuté avec lui avant sa production. Il nous a éclairés sur des détails, des sonorités afin que l’appropriation des titres soit commune. Une vraie relation d’échanges et de confiance qui nous a donné une autre vision sur certains titres. Dave a un talent incroyable qu’il diffuse avec beaucoup de simplicité, de gentillesse, mais aussi de rigueur. Un mec admirable qui est aujourd’hui devenu un ami parce que nous avons beaucoup de connexions communes.
On travaille comment avec lui ?
S : Nous lui avions transféré toutes les pistes brutes. Il nous a donné une feuille de route avec des indications très précises. Nous sommes donc retournés en studio refaire des pistes de guitares, de voix et de basse. Avec des micros précis et pour la voix, des choix d’interprétation sur certains passages. Mais Dave n’a pas changé l’univers de Frakture. Il ne voulait pas toucher à l’identité du groupe.
Mais c’est un album qui est largement international ?
S : Je te vois venir (rires)… On nous l’a souvent dit. Mais c’est vrai que nous avons beaucoup de connexions en dehors de la France. Je pense notamment en Russie, au Japon et chose surprenante, en Amérique latine. Et maintenant en Angleterre.
Dave Allen vous a fait passer dans une autre dimension ?
P : Oui, bien sûr et avec le travail qui a été fait en plus c’est évident. Nous avons un son incroyable ! Enfin pour des Français ! (rires)
Qu’aviez-vous musicalement dans la tête au moment de faire ce disque ?
S : Je n’ai jamais beaucoup de musique dans la tête et ça peut paraître un paradoxe. Je me nourris peu de musique. Je n’ai pas l’esprit disponible pour m’évader lorsque j’écoute du rock car je focalise toujours sur des détails qui me font sortir d’une écoute sereine et confortable. Écouter de la musique ne doit pas être technique, et malgré moi je m’enferme trop là-dedans. C’est la raison pour laquelle je m’immerge dans le classique ou le baroque, car l’approche, la technique ou les codes sont différents.
Donc tes influences sont peu musicales, c’est l’art en général que tu aimes ?
S : Sans prétention je dirais oui. Parce que c’est pour moi la seule forme de liberté qui existe. C’est d’ailleurs pour ça que les artistes ont toujours été persécutés. Car la liberté de penser et de créer est l’ennemi le plus redoutable pour le pouvoir. Mais la musique a été un hasard dans ma vie, car si j’avais eu un pinceau ou un marteau je me serais sans doute exprimé avec la peinture ou la sculpture. Quoiqu’avec un marteau on peut faire de la politique ! (rires)
Frakturec’est la rencontre entre un artiste, Sergeï et un musicien, Karels ?
S : Non Karels est un artiste…
Ce n’est pas péjoratif pour Pascal Karels, mais j’ai l’impression qu’il est surtout musicien ?
P : J’aime surtout écrire des titres, créer des chansons, quel que soit le postulat d’arrivée. Qu’il y ait des disques ou pas. Ce qui m’intéresse aussi c’est de s’ouvrir vers de nouveaux horizons à travers les titres. Ça reste basique, mais c’est ce qui me plaît.
Mais pour tous, Frakture est basé sur la relation entre vous deux : est-ce que le groupe ce n’est pas que vous deux ?
P : C’est une histoire de symbiose entre nous deux. Quand Sergeï a une idée, je sais traduire ce qu’il a dans la tête parce que je suis le musicien.
Mais toi tu es le membre du groupe qui est dans la scène, qui va aux concerts, et qui joue avec plein de monde. Tu es le vrai musicien du groupe. Et il y a de l’autre côté Sergeï Papail, qui est la proue du groupe. Vous avez besoin l’un de l’autre pour exister ?
S : Dans Frakture, oui, effectivement, tu as raison. Frakture c’est nous deux parce que cela a toujours été et ça ne changera pas. Karels est un vrai musicien plein de talent, ingénieux, inventif. Il a une sensibilité incroyable parce qu’il touche à plein de domaines différents en musique. Il a un amour de la musique et de l’instrument qui est très fort, et qui ne se limite pas au rock. Un amoureux des instruments parce qu’ils lui permettent de mettre en lumière son amour de la musique. On est plus que des amis, on est des frères. Moi je suis animé pour créer des choses. Quand je compose, j’ai toujours une vision quasi complète du morceau dans la tête. Mais il est souvent difficile d’exprimer cette vision et ce ressenti à un autre musicien. Karels, lui, comprend tout de suite. Souvent un regard suffit.
P : C’est 44 ans de fraternité…
Je voudrais parler de Pascal Trogoff et de Philippe de Lacroix-Herpin qui sont des « compagnons de route » de Frakture. C’est ces deux musiciens qui jouent du saxophone sur l’album et qui ouvrent le disque vers de nouveaux territoires ?
S : Ils ont tous les deux des univers différents. Philippe de Lacroix-Herpina été notre batteur remplaçant en 78 ou 79, et donc pour moi c’est un membre historique de Frakture à part entière. J’ai encore le souvenir de son jeu puissant et technique. Pascal Trogoff, lui, a été saxophoniste et a fait les Transmusicales avec nous en 1980. Deux artistes qui ont fait partie du groupe sans jamais se rencontrer sur scène. Donc on les voulait tous les deux sur notre album car notre amitié envers eux est restée intacte. Il y aussi Ert (Ex-End of Data N.D.L.R.) sur l’album. Son histoire dans le groupe a été plus longue et surtout plus marquante, car c’est grâce à lui que nous avons refait surface en 2004.
Là encore un musicien libre, donc trois musiciens très libres qui ont pu exprimer leur liberté artistique sur ce disque…
S : Ert est intervenu dans la composition de Morning Days avec nous. C’est un morceau que j’aime beaucoup car il me renvoie à une histoire personnelle. On termine l’album avec ce morceau. Un hommage à quelqu’un qui est là-haut maintenant. C’est aussi le morceau préféré de Dave Allen. Ert a composé une partie de piano magnifique à la fin de ce morceau. Philippe Pascal m’avait envoyé un texto après l’écoute de ce titre et m’avait dit « le final au piano, chef-d’œuvre… ». Je le pense aussi tant l’interprétation rend hommage à ce que dis.
Frakture, c’est un groupe ou un collectif de musicien ?
P : Frakture est une entité avec Sergeï et moi, et tout est possible autour.
S : Je n’aime pas la situation figée des groupes. Oui, Fraktureest un groupe qui a la notion du collectif. Nous ne nous restreignons pas à la musique. Pour moi, dans le groupe, il y a aussi Richard Dumas (le Photographe N.D.L.R.). C’est lui qui a façonné en grande partie notre image. Notre dernier clip Caresses d’un abîme en est la meilleure démonstration. C’est aussi quelqu’un qui nous connaît parfaitement Pascal et moi. Il sait déceler le détail que personne ne soupçonne. Exploite l’expression de manière spontanée et subliminale. Son travail va au-delà de la photographie. C’est notre ami de confidences aussi quand les choses vont bien et moins bien aussi.
On parle ici de personnes comme Richard Dumas ou Dave M. Allen qui sont considérés comme des « grands » dans leurs catégorie, et qui sont capables de se mettre au service du collectif pour Frakture ?
S : Grands, oui ils le sont. Mais comme je le dis, ce sont avant tout des amis et cette question de la complicité et de l’amitié est primordiale pour moi. C’est une part importante dans la confiance que l’on doit avoir en soi, car faire de la musique n’est ponctué que de doutes et d’appréhensions.
Si je vous dis Frank Darcel et « Coop Breizh » ?
S : Frank, c’est une vieille histoire entre nous. Une histoire commune à une période (Marquis de Sade N.D.L.R.) qui a beaucoup compté pour moi. Il a écouté l’album et ça lui a plu. Frank n’est pas du genre à te faire des compliments si tu es hors des clous. Je connais son approche artistique. Elle est professionnelle et attentive. J’ai du respect pour ce qu’il a fait tout au long de sa carrière.
Et Coop Breizh qui est votre distributeur. C’est très marqué breton pourtant, alors que vous ne vous êtes jamais revendiqués de la Bretagne ?
S : Coop Breizh ne fait pas que du breton ! Tous les distributeurs nationaux que nous avons contactés nous ont snobés. C’est Frank Darcel qui nous mis en contact avec Coop Breizh. Ils sont très professionnels et rigoureux et respectent leurs artistes. C’est rare aujourd’hui.
Pour revenir à votre album So Blind To See, il parle de quoi ?
C’est toujours très compliqué d’expliquer ce que raconte une chanson. Je ne démarre jamais un texte en me disant « je vais aborder ce thème ou j’aimerais bien parler de ça ». Ce que j’écris est toujours guidé par une émotion, une révolte, un sentiment à un moment donné. C’est ce que l’on retrouve dans So Blind To See. Mais c’est globalement un album plus sage par rapport à ce que j’ai pu écrire par le passé. Excepté le morceau Flies qui reste dans la lignée de nos anciens répertoires. C’est-à-dire une dénonciation des pouvoirs, leur côté hypocrite et démago. Mais aussi leur violence, leur mépris et leur côté charognard et incontrôlable.
Mais à l’exception de ce titre, la toile de fond de l’album est l’amour, la mélancolie, la peur, la souffrance, sous toutes leurs formes. Comme dans Broken Ways, par exemple, qui est une sorte de recueillement envers les survivants d’actes de barbarie. Autant le morceau « Y », sur notre EP, était une écriture spontanée au moment de l’attentat au Bataclan, autant Broken Ways est empreint du silence de la douleur et de la peine de toutes celles et ceux qui en ont réchappé.
Mais il y a aussi des titres à l’écriture plus psychédélique, comme Lost in Heaven, où je m’imagine assis au bord d’un nuage en train de jouer avec des anges…
L’avenir de Frakture ?
S : Pour l’instant, un nouveau titre enregistré à Balloon avec Karels à la batterie et à la guitare, et Laureline qui n’était pas sur l’album. Ça devrait sortir bientôt. Quant aux concerts, en ce moment, c’est plus que compliqué… Six d’annulés dont cinq à cause de la crise sanitaire, qui est arrivée juste après la sortie du disque. Mais dès que possible, oui. On en crève d’envie !
Frakture : album « So Blind to see » Coop Breizh distribution
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