Alexandr : « Aloners to the world », un premier album salvateur

vendredi 26 mai 2023, par Franco Onweb

On l’attendait depuis quatre ans , le premier album du trio franco-britannique Alexandr ! Cela fait plus d’une décennie que Stephen Fozard, Nick D’Arcy et Nicolas Beyer font de la musique. Ils ont joué et participé à un grand nombre de projets, avant de se stabiliser sur Alexandr et sa pop psyché et groovy largement inspirée de la fameuse scène de Manchester de la fin des années 80 et début des années 90. Après deux EP splendides, ils se lancent enfin sur ce premier album qui est une réussite totale. On navigue entre “baggy sound” et pop psyché avec une maîtrise rarement atteinte dans ce pays.

Stephen Fozard et Nicolas Beyer ont répondu à mes questions pour en savoir plus sur un album qui est déjà le compagnon estival idéal !

Vous avez sorti un quatre titres en 2019. Que s’est-il passé depuis ?

(Stephen Fozard – Chant et guitare) On a sorti l’EP « Surrender » à l’automne 2019 et en décembre 2019, nous avons posé la première pierre de cet album « Aloners To The World ». On a commencé à travailler sur un titre puis le Covid nous a bloqués. On a dû annuler des dates mais cela a été pour nous une période créative : on a ressorti un titre de l’EP Show Them How To Play ») et on a même réalisé un clip fait à la maison. Chacun s’était filmé chez lui. Ensuite, on a travaillé sur l’album.

Alexandr, de gauche à droite Nick D’Arcy, Stephen Fozard et Nicolas Beyer
Crédit : Astrid Karoual

Vous l’avez fait où ce disque ?

(S) Tous les titres, les voix et les instruments ont été faits à la maison ou plutôt dans nos trois maisons respectives. On travaille chacun chez nous et après, on se retrouve pour tout mettre en commun. Nick fait ses guitares chez lui, Nicolas ses basses et moi mes voix. Depuis les débuts d’Alexandr, on a toujours fonctionné ainsi. L’un de nous propose une chanson, fait une maquette, puis on met en commun et chacun amène ses arrangements. C’est une manière de travailler assez moderne. Après, bien entendu, on les répète tous ensemble. Tout a été enregistré en Home Studio…même si c’était parfois la table du salon !

Et pour le mix ?

(S) On a cherché quelqu’un pour mixer le tout et on a demandé à un anglais Adrian Bushby, de le faire. Il a mixé New Order, Muse… Il est très connu dans le milieu. On l’a contacté par son manager et il a été rapidement d’accord parce qu’il avait aimé les morceaux. Cela s’est très bien passé.

Votre précédent EP était très marqué par le « Madchester »avec un son très baggy. Sur cet album, vous ouvrez sur des sonorités plus pop et plus rock, tout en gardant le « baggy sound ».

S : C’est vrai, il y a plus d’influences sur cet album dont une qui était assez rare chez nous avant : Depeche Mode. On a un titre (« Stop Rolling The Dice »)qui est très influencé par eux. En ce qui concerne le « Baggy sound », c’est quelque chose que nous aimons beaucoup tous les trois et Nicolas (Beyer, bassiste du groupe NDLR) fait de supers rythmiques dans ce style !

Nicolas Beyer (Bassiste) : On vient de la Britpop et on a écouté ce qu’il y a eu, avant et après, autour de cette scène. J’ai eu un gros coup de cœur pour la scène de Manchester de la fin des années 80, le « Madchester » avec les Stones Roses ou autre Happy Mondays… avec ce côté groovy que le rock n’avait plus. On s’en était un peu imprégnés pour le 2d EP. Quand on fait un disque, il y a toujours les humeurs du moment et là, même s’il y a toujours du Baggy, c’est plus large.

Cette scène avait un côté très social : des gens dansaient et s’amusaient malgré la misère économique de cette région. Est-ce que vous revendiquez aussi ce côté ?

N : Les temps ont changé ! Les classes sociales ont évolué et c’est dur pour beaucoup. On revendique juste le fait de faire plaisir aux gens à travers notre musique.

Vous pourriez aujourd’hui faire des productions indépendantes, devenir des producteurs, faire des remix, ce genre de choses…

N : On travaille tous à côté, on ne vit pas de la musique. On se concentre donc sur le projet Alexandr. En ce qui concerne les remix, on a des amis qui nous ont remixés. C’est clair que c’est quelque chose que nous avons en tête.

Vous avez plusieurs morceaux qui peuvent être remixés pour le Dancefloor. On a l’impression que vous êtes tiraillés entre la piste dance et la scène rock ?

N : On est tiraillés par plein de choses ! On est en 2023 : on mélange des choses, on est plus dans une scène précise… même si on s’y réfère souvent. On a l’ambition de faire bouger les gens avec notre musique mais avec de bonnes chansons.

Vous pourriez faire des concerts qui seraient un mélange entre le clubbing et la pop ?

S : On se voit plus comme un groupe de rock et de pop qui fait des morceaux de 3m30. On a fait réaliser des remixes pendant des années et on continue. C’est toujours une question que l’on se pose. Je n’ai jamais fait de remixes pour Alexandr. A vrai dire, ce qui m’intéresse le plus est d’avoir des side projects ou de rejoindre d’autres groupes pour assouvir d’autres envies musicales. J’en ai déjà rejoint deux où je pouvais avoir des fonctions ou des instruments différents, comme bassiste, que je n’avais pas dans le groupe.

Alexandr
Crédit : Astrid Karoual

Vous pourriez fonctionner comme un collectif. Vous savez jouer des instruments, produire, remixer, réaliser…

N : Déjà chez nous. Aujourd’hui, je joue la basse à plein temps, ce qui n’était pas le cas avant. Nous sommes trois personnes qui ont leurs personnalités, leurs compositions ou leurs envies. On met tout ça en commun et cela fait Alexandr. On a tous une dominante sur certains sujets et la synthèse fait le groupe. On vient de la pop et non de l’électronique. On n’est pas très bons avec des logiciels d’électro par contre, on maîtrise le côté multipistes avec des guitares.

Votre album s’appelle « Aloners to the world ».

S : C’est une des phrases de « Parisian », un de nos plus vieux titres qui est sur l’album. On l’avait abandonné et je l’ai retrouvé dans un tiroir, en y mettant un son baggy. Je l’avais écrite quand j’étais étudiant. « Aloners » n’existe pas en anglais, c’est une contraction de « Alone » (seul) et « loner » (solitaire) et quand on a vu la phrase on a dit « banco ».

Vous vous sentez seuls au monde ?

N : Ce n’est pas forcément nous ce titre. On vit dans un monde de plus en plus éclaté. Les gens sont de plus en plus seuls et on crée cette intimité en écoutant nos titres au casque, seul la nuit… Il n’y a rien de mieux !

S : C’est aussi un clin d’œil à Richard Ashcroft qui avait écrit « Alone with everybody » où tout est dit.

Votre album rappelle beaucoup Manchester, mais vous avez des titres psychés, des titres baggys, une ballade… Vous avez beaucoup de sons et de rythmes différents sur l’album. C’était délibéré ?

N : C‘est une question de maturité : on fait de la musique depuis longtemps et donc, il y a d’autres styles que nous avons écouté. C’est un peu hybride et c’est tant mieux. Après, comme l’a dit Stephen, certains titres sont assez anciens et ont le goût de ce que nous écoutions à l’époque.

Par exemple, votre titre « Not Giving Up » est de la pure pop alors que B.O.Y est presque de la Soul ?

S : On est trois à écrire et même si on cosigne tout à trois, il y a toujours une dominante de l’un d’entre nous et nos influences personnelles vont sortir un peu plus. Le seul « fil rouge », est peut-être ma voix. Nick, le troisième du groupe, joue des claviers, en plus de la guitare et là encore, cet apport de clavier se sentira plus sur certains titres, comme sur « B.O.Y.(Because Of You) » justement.

Qui écrit les textes ?

S : Chacun de nous écrit des textes.

N : Nous avons tous une personnalité différente et donc, nous avons tous nos textes. Après,on se retrouve et on met tout en commun pour faire du « Alexandr ».

Ils parlent de quoi ?

N : De nos expériences personnelles avec des images et de l’imagination. On fait un mélange pour arriver à quelque chose d’intéressant.

S : Je ne me pose pas trop de questions. En tout cas, ça ne parle pas de politique ou d’environnement, je me sens concerné par ces sujets mais cela ne m’inspire pas des textes. En fait, 98% de mes textes parlent de relations humaines : l’amitié, l’amour, la trahison, le manque…

Votre grande influence c’était Oasis et là, on la sent de moins en moins. Vous aviez quoi en tête en faisant ce disque ?

S : Ados, on était aussi très fans des Smashing Pumpkins. Pour Oasis, on les a tellement écoutés et on s’est tellement inspirés d’eux qu’on fait attention maintenant à ne plus trop s’en rapprocher.

Le premier single était « 1996 », c’est très daté comme référence : c’est l’avènement d’Oasis !

S : En fait, le titre sonnait bien et effectivement c’est daté musicalement !

Vous finissez ce disque par une ballade : pourquoi ?

N : c’est clairement de l’héritage des Smashing Pumpkins. Ça fait du bien aux oreilles et ça permet de bien finir, calmement…

Ça va se passer comment sur scène ? Vous serez trois ?

S : Pour le moment oui, mais on a le fantasme d’avoir un être vivant derrière nous à la batterie un de ces jours ! (rires). En fait c’est beaucoup plus simple d’avoir des machines bien travaillées pour jouer dans les lieux où nous jouons.

Mais vous seriez capables d’inclure quelqu’un à votre trio ?

N : C’est une affaire de rencontre, pour l’instant on n’a pas rencontré de batteur avec qui on se sent bien.

Vous avez joué où ?

N : Principalement à Paris et en Angleterre (Londres, Liverpool et Manchester). On vient de province et on aimerait beaucoup y retourner pour jouer. C’est prévu pour bientôt.

Vous êtes chez Hot Puma Records, un très beau label.

S : On les a contactés par mail, enfin Sergio, le label manager, en 2019 pour notre deuxième EP. Il avait aimé mais il ne pouvait pas nous prendre à l’époque. Je l’ai recontacté pour l’album et il nous a proposé un test pour le premier single et depuis,on travaille ensemble.

C’est un label qui vous va bien ?

S : On est ravis de retrouver un label. Maintenant, nous avons une bonne équipe avec nous et en plus, on est assez actifs puisqu’il a toujours fallu que l’on se débrouille un peu tout seuls. On a maintenant aussi quelqu’un qui gère le digital en Angleterre.

Alexandr
Crédit : Astrid Karoual

Votre grand projet, c’est de vous exporter de plus en plus Outre-Manche ?

N : Oui, mais aujourd’hui avec internet et les écoutes digitales, on voit qu’on est écoutés partout sanstrop bouger de chez nous et c’est un grand changement par rapport à il y a quelques années où il fallait avoir un distributeur physique qui nous ne pouvait pas aller partout.

Le mot de la fin ?

N : Venez nous voir le 23 juin au Supersonic pour notre Release Party !

Quel disque donneriez-vous à un enfant pour l’emmener vers la musique ?

S : L’album d’Oasis « (What’s the story) Morning Glory ? ».

N : Le premier album de Genesis.

Release Party le 23 juin au Supersonic :
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