L’Ambulancier, rencontre pour un premier album innovant

jeudi 5 décembre 2024, par Franco Onweb

Il est enfin arrivé le premier album de l’Ambulancier ! Derrière ce pseudonyme se cache Palem Candillier, un des musiciens les plus actifs de la scène parisienne qui a su se réinventer plusieurs fois en fonction de ses aspirations. Il y a trois ans, il avait sorti un premier EP pour présenter son nouveau projet et il l’avait promis l’album serait pour bientôt. Trois années durant lesquelles Palem a travaillé, essayé ou testé beaucoup de choses qui ont débouché sur ce disque qui est une sorte d’Ovni dans une scène musicale souvent trop sage.

Il y a d’abord ce personnage mystérieux, l’Ambulancier, qui parcourt la ville de nuit. Une sorte d’anti-héros des temps modernes. Ensuite il y a ce son : des grosses guitares très en avant, appuyé par des samples discrets, une rythmique qui martéle le tout, avec la voix de Palem qui est impeccable. J’ai voulu en savoir plus, j’ai donc discuté un très long moment avec lui pour en savoir plus sur un disque qui est, peut-être, le projet le plus original que j’ai entendu depuis longtemps !

Que s’est-il passé entre le premier maxi en 2021 et cet album ?

Il s’est passé beaucoup de choses ! Tout d’abord je suis très content d’avoir réussi à faire cet album. En 2022 on a fait pas mal de concerts. Cela a permis de développer le projet sur scène et de proposer l’univers de l’Ambulancier. En 2023, j’ai beaucoup travaillé sur cet album en enregistrant des morceaux, en essayant des choses… Cela a été de longues séances de travail à « La Kapsule » le studio où je travaille à Montreuil. J’ai aussi travaillé sur le graphisme et plus globalement sur l’univers qu’on voulait pour ce disque. Ça a fait deux années bien remplies qui ont permis de grandir le projet.

Palem Candillier
Crédit : Jordan Dorey

Est-ce que l’Ambulancier serait un concept ?

On m’a souvent posé la question. On m’a même demandé si c’était un « One Shot ». Pour moi c’est un vrai projet avec un cadre, un univers et avec cet album, je veux le prouver : c’est un vrai projet qui a une identité musicale. Avec le temps, j’ai appris à l’apprivoiser je pense.

Quand on voit les titres et ton clip « L’Ambulancier Song » qui a lieu la nuit où tu es seul, on peut penser à un concept ?

Oui, il y a de ça. Il y a des chansons sur le disque qui m’ont permis de construire l’ambiance du personnage. Je pense que c’est important une identité forte et que cela ne me limite pas pour la suite. Je ne sais pas où je vais aller mais je ne me sens pas cloisonné dedans.

Par rapport au premier maxi, on voit une immense différence de sons. Tu as un gros son avec des énormes guitares, une rythmique qui est à fond et ton chant a une espèce d’urgence.

Merci beaucoup, j’ai beaucoup travaillé. Sur le premier maxi, j’ai essayé des choses et puis j’ai fait des rencontres qui m’ont permis de trouver ses sons. Je me suis formé aussi sur des logiciels. Pour ma voix j’ai super été influencé par le chant de Peter Lorne qui interprète le générique des Tortues Ninjas. Il a une énergie incroyable, très fédératrice et je ne connais pas grand-chose de semblable.

Mais il y a une espèce d’urgence.

Je suis ravi que tu dises cela !

Il y a tes textes. Il y a le texte de « L’Ambulancier Song » avec ce côté deuxième degré du héros perdu dans la ville en pleine nuit.

C’est effectivement une sorte de héros, ou même d’anti-héros qui se cache derrière un métier « normal ». J’aime ce deuxième degré. A postériori je m’aperçois que l’album parle beaucoup de ça : perdu dans le monde, perdu dans la ville… C’est en regardant les chansons que je me suis aperçu que souvent le thème de n’être pas à sa place revenait. C’est quelque chose que beaucoup partagent. Je trouve que cela donne une cohérence à l’album.

On a l’impression que tu as développé une fixation sur les USA, alors que ton disque n’est pas du tout américain !

(Rires) Pour moi, il l’est, ne serait-ce qu’au niveau des guitares et de l’ambiance. J’aime imaginer ce que seraient les USA s’ils parlaient français. Je suis même en train de développer un roman en ce moment avec ce postulat.

Il y a aussi « Panne sèche » avec le mythe de l’aventurier perdu dans son véhicule ?

Oui c’est vrai et ça fait que l’album soit cohérent. Ça me fait penser à la suite : vais-je rester aux USA ? Est-ce que je vais bouger ?

Ton album parle aussi beaucoup de la nuit. On a l’impression que tu vis beaucoup la nuit ?

J’ai quand même une chanson qui s’appelle « Donatello », une tortue Ninja et comme elle je vis beaucoup la nuit. J’aime l’esthétique de la nuit avec les néons, les éclairages, les rues… C’est très cinéma tout ça, comme dans « Taxi Driver ».

Crédit : Jordan Dorey

Ne serait-ce pas la nuit que l’Ambulancier apparaît ?

Si, c’est même le thème du prochain clip « Donatello ».

Tu penses que ta trajectoire est logique par rapport à ton premier groupe « So Was the Sun » ?

C’est vraiment une question que je me suis posée. J’ai décidé d’arrêter de croire qu’il y a une logique dedans. Je fais ce que j’ai envie de faire. J’ai gardé des choses de « So Was the Sun », comme le fait que j’aime les guitares, j’ai gardé des influences… ça me plait de faire quelque chose de différent. Cela m’aurait ennuyé de refaire le groupe. C’est ma logique !

En même temps, on pouvait comparer « So Was the Sun » à plein de choses, ton nouveau projet est totalement personnel.

Merci, c’était mon but.

Tu avais quoi en tête, musicalement et culturellement, quand tu as composé et enregistré ce disque parce que tu as un univers culturel global, d’ailleurs tu écris des livres ?

En musique je faisais l’écart entre Carpenter Brut et Alain Souchon. Pour les autres références c’étaient les films de Scorsese, de Palma et beaucoup de John Carpenter dont je suis un gros fan. Évidemment il y avait les Tortues Ninjas. Pour les textes je suis un grand fan de Michel Houellebecq et de poésie surréaliste comme Robert Desnos.

Est-ce que le personnage de l’Ambulancier ne serait pas un personnage de Pop Culture ? Pour moi tu fais de la pop ! As-tu laissé le rock derrière toi, sauf sur les guitares ?

Oui, j’écoute de moins en moins de rock « classique ». Je suis beaucoup plus dans des musiques transgressives comme de la pop, de l’électro ou de la chanson…. J’écoute parfois des vieux trucs de Blues, quelque chose d’authentique.

On a l’impression que le rock t’ennuie ?

(Rires) Tu as l’impression ? Ce n’est pas faux (rires) ! J’aime encore le rock mais le fait que ce ne soit plus un groupe mais un personnage seul. Quand on fait ça, tu te mets de côté : plus de guitares, basse et batterie. Je peux me permettre ce que je veux. Je peux avoir des formations différentes sur scène. J’ai dit ce que j’avais à dire avec le rock et j’ai envie d’autre chose….

Pourrais-tu faire évoluer ce personnage sur d’autres supports, comme des livres, de la BD ou même des dessins animés ?

Si bien sûr, j’aimerais en faire un vrai personnage de fiction, comme dans le roman que j’écris. C’est avant tout un personnage musical et scénique. J’aimerais surtout aller dans le spectacle vivant et dans les réseaux sociaux. Pour les autres médias, je ne suis pas contre une collaboration mais je ne veux pas trop m’éparpiller.

Ce personnage est né parce que tu as trouvé cette chemise dans une friperie ?

En partie. Quand j’ai trouvé cette chemise, j’avais des chansons mais pas de ligne directrice. Au même moment, il y a eu plein d’ambulances qui ont commencé à se garer en bas de chez moi. Il y a eu pleins de détails et de petits signes qui m’ont emmené à faire ça.

En studio
Crédit : Samuel Hebting

Comment ça se passe sur scène ?

On est quatre, avec trois brancardiers et une brancardière. On utilise des samples. Tout le monde est « looké » sur scène et on emmène le public dans ce que j’appelle « French Manhattan », un univers à la fois français et américain. C’est très énergique ! On essaye d’avoir un vrai partage avec le public puisque on est là par plaisir. On essaye aussi d’avoir de l’humour !

Cette musique peut t’emmener dans des formations différentes ?

Oui, j’ai plein de formations différentes, par exemple quand je suis seul sur scène et bien j’ai juste ma guitare. Je veux rester un artiste musicien.

Tu as beaucoup joué avec l’Ambulancier ?

Trouver des dates c’est compliqué ! Il y a de moins en moins de lieux pour jouer à Paris et en région parisienne. J’essaye le plus possible d’aller en province. Maintenant, j’organise moi-même souvent mes plateaux dans des endroits que je loue. Je fais des soirées en français, aussi paritaire que possible avec une présence masculine et féminine égale. On essaye aussi d’avoir des groupes qui n’ont pas la possibilité de monter souvent sur scène ou même dont c’est la première fois. C’est mon côté militant ! Je n’attends pas les concerts : je les monte !

En concert
Crédit : Leah Marciano

Vous avez beaucoup joué ?

On vient de faire le Zèbre de Belleville. En 2022 le festival d’Avallon (Festivallon NDLR) nous a fait jouer six jours de suite et c’était super ! On a joué à Amiens, il y a peu de temps, on est allé à Massy aussi… On essaye vraiment de jouer le plus possible mais franchement c’est compliqué ! J’essaye de faire les choses de manière intelligente en respectant les budgets parce que j’ai des musiciens à payer.

Ton disque sort sur Tadam, un label qui fait plaisir à revoir. Que s’est-il passé ?

On a changé notre manière de travailler. On était plusieurs groupes à vouloir animer le label mais on n’avait pas tous la même manière de fonctionner. Certains sont partis… Yann Landry, le fondateur, et moi on voulait faire les choses autrement. Sur le label il y a l’Ambulancier, les Iguanes le projet de Yann autours des reprises d’Iggy Pop en Français et Lucy Folch un projet qui vient du sud et qui est super. On s’est resserré autours de quelques groupes pour faire bouger les choses. Lucy anime, par exemple, les rencontres de Tadam Records une fois par mois qui sont des rencontres entre musiciens sur les réseaux sociaux pour essayer de faire partager nos expériences. On se sent moins seul avec ce genre d’initiatives.

Tu l’as fait où et avec qui ce disque ?

Au studio la Kapsule à Montreuil avec Hugo Cechosz qui a travaillé avec pleins de monde. On a masterisé avec Vincent Louvet qui a aussi un gros CV.

Quels sont tes projets, musicaux et autres, parce que tu écris aussi des livres, notamment sur les Beatles et Nirvana ?
Fin 2025 il devrait y avoir un livre, dans la même collection que les Beatles ou Nirvana, un livre sur « Closer » l’album de Joy Divison. Je vais continuer à écrire des articles sur la musique, notamment pour Magic, et puis je vais surtout me concentrer sur l’Ambulancier pour faire avancer les choses avec des contenus que je n’ai pas encore montrés. J’ai aussi mon groupe de reprises « Les Reines du Baal » avec lequel je fais pleins de superbes prestations.

Ton univers n’est-il pas très enfantin, ce qui n’est pas adolescent, avec une forme d’innocence et de romantisme sans perversion ?

En fait j’aime jouer ! J’aime jouer un rôle, j’aime m’amuser et je trouve que c’est super important de garder cette notion-là. J’aime faire rire. J’aime surtout ne pas me prendre au sérieux. Je trouve assez sain ! Je m’éclate à jouer dans mes clips !

Le mot de la fin !

Merci !

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